"Je n’use que de ma voix si proche du silence et qui n’a que l’obstination fragile du coquelicot pour te mettre à la question il ne me faut que la tenaille des mots durcie au feu continu du chagrin mais par exemple je ne demande moi ni pourquoi ni comment ma question est ailleurs elle est bien avant le pourquoi et le comment je demande ce que c’est qu’est-ce que ce flux nerveux qui court des neurones à l’extrémité du bras et fait plier l’index sur la gâchette d’une arme automatique ? et qu’est-ce qui est automatique l’arme ou le geste ? qu’est-ce que cette émotion sèche qui gouverne la main meurtrière ? qu’est-ce que voit réellement l’oeil qui vise ? qu’est-ce que le bruit des viscères qui se rompent dans l’oreille du tueur ? qu’est-ce que le relâchement de l’effort dans les muscles tendus pour tuer ? [...]"
Stabat Mater Furiosa de Jean-Pierre Siméon, 2000 (rééd. 2012)
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